Nos secouristes

Des centaines de bénévoles à travers le monde font partie de la famille «Sauveteurs Sans Frontières», mobilisés pour sauver des vies. Bon nombre de nos secouristes et médecins interviennent tous les jours, dans des régions reculées où les secours peinent à arriver. D’autres se tiennent prêts pour intervenir en cas de catastrophe.


 

Népal 2015 : interview d’un sauveteur de SSF

Moshe Sadia est un urgentiste franco-israélien, il a 42 ans et 6 enfants. Dans la vie civile, il est optométriste (vision et santé des yeux). Il a fait partie d’une mission de secourisme où une équipe de Sauveteurs Sans Frontières est partie au Népal dès le lendemain du séisme, le dimanche 26 avril 2015.

Moshe Sadia : un sauveteur en action

Moshe Sadia : un secouriste en action


Racontez-moi les préparatifs ?

Quand le tremblement de terre a eu lieu samedi, c’était shabbat. Mais j’ai compris que j’aurai un appel samedi soir… et nous avons pris la décision de partir dès que possible. Notre équipe SSF était composée de 4 médecins et 4 paramédicaux.

Dans notre entrepôt SSF, nous avons tout le matériel médical en stand by. En fonction du type de catastrophe, nous connaissons les blessures et choisissons les médicaments appropriés. Nous avons pris beaucoup de pansements, de bandages, de plâtres, du paracétamol (anti-douleurs) et des antibiotiques. Sans antibiotique, des blessures peuvent s’infecter et malheureusement provoquer la mort en quelques jours. Nous avons pris un générateur pour avoir de l’électricité (heureusement !), des vêtements chauds pour nous, mais pas assez chauds…

Comment s’est passée votre arrivée dimanche à Katmandou ?

Il n’y avait pas de places dans les avions donc nous sommes partis en premier Arié (Lévy) et moi.
Puis, le reste de l’équipe est arrivée environ 10 heures après. Et nous avons pu recruter sur place une pharmacienne, un médecin français et 2 étudiants israéliens qui parlaient le népalais… On a pu ainsi commencer à préparer le terrain, s’organiser pour les communications et voir où on allait intervenir. A l’aéroport, c’était totalement désorganisé et on avait peur de ne pas retrouver nos valises, notre matériel et le générateur.

La logistique a suivi ?

Il y avait très peu d’électricité. C’est un problème pour le matériel médical qui est sur batterie, mais qu’il faut quand même recharger. Il a fallu aussi trouver de l’essence sur place pour faire marcher le générateur et donc avoir de l’électricité. On a pu acheter quelques litres d’essence. Un autre jour, on a dû pomper de l’essence avec un tuyau dans le réservoir d’une moto cassée… Dans ces missions, la logistique est très importante et c’est une chaîne. S’il manque un maillon, rien ne marche.

Après votre intervention à Katmandou à l’hôpital de Bir, où vous avez soigné des dizaines de blessés, vous êtes partis le lendemain vers les villages aux alentours. Racontez-nous.

On a réussi à louer un minibus avec un chauffeur népalais où on a casé tout le monde, le matériel sur le toit. Il y avait des villages moins touchés que d’autres. Donc on a acheté tout ce qu’on a pu trouver comme nourriture (des centaines de kilos de riz). On a purifié l’eau avec des cachets de chlore pour donner aussi à la population la possibilité de boire… Et on a commencé à soigner les populations.

Moshe Sadia, Hôpital de Bir, Népal

Moshe Sadia, Hôpital de Bir, Népal

Comment avez-vous été accueillis par la population ?

On a été très impressionné par leur calme et leur sourire après tout ce qu’ils ont enduré. On n’a vu aucune violence, mais on a vécu des moments de tensions. Sur la base militaire où on avait installé notre hôpital de campagne, on gérait les arrivées et départ d’hélicoptères. Les équipes de SSF stabilisaient les blessés qui venaient des villages alentours puis choisissaient ceux qui devaient repartir dans des gros hélicoptères de l’armée (26 places). C’était difficile de choisir ceux qui allaient partir. Quand un enfant a perdu sa mère et que son père veut monter avec lui, on doit choisir un blessé plutôt que le père… Tout le monde voulait monter…

Après une semaine sur place, votre équipe est rentrée. Quelle sera la suite ?

Tout d’abord, on a laissé à une petite équipe de français (un infirmier et 1 logisticien) et tout notre matériel pour qu’ils continuent le travail. Ils nous représentent désormais.
Aussi, on a pris la décision d’ouvrir une section SSF au Népal. Comme on a fait sur toutes nos opérations (Philippines, Kenya, Haïti), on va repartir dans quelques mois, on va recruter un groupe de volontaires et on va les former au secourisme en leur donnant du matériel.

Est-ce que votre mission était réussie ?

Oui, elle était très réussie car on a fait du très bon travail. On est arrivé dans des zones où les gens avaient vraiment besoin de nous. On avait tellement à faire qu’on se relayait pour dormir… Les uns préparaient le matériel pour le lendemain avec des lampes frontales pendant que d’autres se reposaient… Après, il y a toujours des choses à améliorer. Comme j’ai vécu toutes les missions de secourismes SSF (Kenya, Sri Lanka, Birmanie, Haïti), on compare les missions. Elles dépendent aussi des moyens qu’on peut avoir pour faire ces missions.

Vous avez vu des choses dures… Comment vous sentez-vous ce soir ?

Ce n’est pas évident, mais on s’y fait avec le temps. On a beaucoup d’expérience… En tant qu’urgentiste, je vois quotidiennement des choses, ici en Israël.
Je suis content de voir les enfants, d’être rentré à la maison. Là bas, il n’y avait rien… On se rend vraiment compte de la valeur de la vie. On est ému d’ouvrir un robinet et de voir de l’eau couler…

 

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